POLITIQUE : La déferlante prolifique
Une vague proliférante déferle sur le pays et l’abîme, depuis des lustres. Fourmillements, pullulements, et excès de toutes sortes, dans tous les domaines. Rien n’est épargné, l’homme, ses activités, ses créations.
Le gouvernement croît et accroît le nombre de ses ministres avec ou sans portefeuille : les émoluments augmentent, les bourses s’élargissent. Les parlementaires s’étant déjà multipliés, s’affairent à hausser leurs indemnités et à rehausser leurs cachets.
Le mois est proche de son terme, une foule innombrable de conseillers désœuvrés arpentent les allées de la Présidence de la République et les couloirs de l’Assemblée Nationale. À la Primature, une multitude de chargés de missions sédentaires s’est mêlé à un contingent de consultants oisifs.
Tout est en en expansion. Toutes les institutions deviennent macrocéphales et obèses. Il y a de la boulimie dans l’air, de l’insatiabilité dans l’atmosphère. Il y a quelque chose d’irrésistible et de contagieux.
Concassage, détritus, eaux polluées, en apparence dormantes, grenouillages, éclosions et profusion : des partis naissent. À une demi-centaine, s’ajoute une centaine. Le taux de natalité est élevé, la démographie galopante. Les partis se multiplient et remplissent le paysage.
Ici, depuis que la pauvreté s’est accrue, et que le pays est devenu le plus pauvre parmi les pauvres, les partis naissent plus pour devenir riches que pour conquérir le pouvoir.
La conquête du pouvoir n’est pas l’essentiel, elle n’est pas le souci de la multitude. La lutte politique qui y mène est rude, elle cruelle, impitoyable. À quoi bon s’y jeter et s’exposer aux risques ? Le pouvoir est richesse, et la conquête n’est le seul moyen de jouir de ses bénéfices.
L’essentiel est d’y être, de s’associer, de nouer des alliances pour lutter contre la pauvreté : la sienne, non celle des autres, encore moins celle du pays dont on s’enrichit.
Inflation de la pauvreté et de la misère matérielles produites, entretenues par confiscation et soustraction des richesses qui appartiennent à tous. Agissements de quelques-uns ayant comme corollaires le gonflement des sentiments d’injustice et d’insécurité, mais aussi l’hypertrophie de la corruption, l’aggravation de la criminalité.
Accélération de la pauvreté et de la misère morales qui avilissent l’homme ; entraînent pertes de repères et de valeurs, et le conduisent à ne plus se soucier de ses droits, de sa dignité, à se soumettre, à accepter sa turpitude et celle des autres. Scandales, déshonneurs et ignominie ne sont plus vécus que dans la complicité du silence.
Silence ! Nous avons peur. Mais peur de quoi ? D’être dignes ?
Silence ! Nous sommes affamés et voulons manger. Mais manger quoi ? Les miettes que l’on nous jette ?
Silence ! Nous voulons être riches. Mais riches de quoi ? Du vol des deniers publics ?
Silence ! Nous voulons vivre.
Vous voulez dire exister : être là, sans plus, au milieu de l’injustice, de la pauvreté, de la corruption, de l’inégalité, subir et se taire ; priver notre humanité de ses droits, de sa dignité.
Notre humanité réclame une manière de vivre plus active, plus décente.
Farmo M.