Message à la Nation du Président de la République, Chef de l’Etat, SEM Issoufou Mahamadou à l’occasion du 58è Anniversaire de la Proclamation de l’Indépendance du Niger


Nigériennes, Nigériens,

Mes Chers Concitoyens,

La situation sécuritaire, la préparation des prochaines élections, la campagne agricole, le défi de la transition démographique, le bilan de l’année scolaire 2017-2018 et l’avenir de notre système éducatif, le rôle que joue notre pays dans le processus d’intégration régionale et continentale sont les sujets que je souhaite aborder avec vous à l’occasion de ce 58ème anniversaire de l’indépendance de notre pays.

 Mes Chers Concitoyens,

La situation sécuritaire dans le bassin du lac Tchad et dans le Sahel reste préoccupante.

Dans le bassin du lac Tchad, la Force Mixte Multinationale composée, des Armées du Cameroun, du Nigeria, du Tchad et du Niger, continue ses opérations contre le groupe Boko Haram. Boko Haram est affaibli. Boko Haram a perdu considérablement du terrain mais Boko Haram conserve encore une certaine capacité de nuisance et une certaine liberté d’action. La Force Mixte Multinationale doit donc rester vigilante et poursuivre avec détermination ses opérations contre l’ennemi jusqu’à sa défaite totale.

Dans la région du Sahel, je me félicite de constater la montée en puissance progressive de la Force Conjointe du G5 Sahel. Cette force a déjà mené plusieurs opérations dans le Fuseau Centre. Par ailleurs, les opérations menées par le contingent Français de l’opération Barkhane et le contingent Nigérien de l’opération Dongo ainsi que d’autres forces amies ont permis d’infliger de lourdes pertes à l’ennemi. Le bon déroulement de l’élection présidentielle au Mali, le 29 juillet dernier, confirme l’affaiblissement des organisations terroristes qui avaient promis de perturber la tenue de ce scrutin. Il s’agit là d’une source d’encouragement pour nous tous. Les résultats obtenus doivent amener la communauté internationale à manifester d’avantage de solidarité pour notre combat. En particulier nous souhaitons, dans cette perspective, que le conseil de sécurité, accède à notre requête en vue de placer la Force Conjointe sous le chapitre 7 de la charte des Nations Unies. La communauté internationale doit également se mobiliser afin que cette force puisse bénéficier d’une source de financement pérenne.

Ainsi dans le bassin du lac Tchad comme dans le Sahel, les vaillantes forces de défense et de sécurité des pays de ces deux régions obtiennent des succès importants contre l’ennemi. C’est le lieu de les féliciter et de leur rendre un hommage amplement mérité. En particulier je félicite et je rends un hommage mérité aux forces de défense et de sécurité de notre pays. Les sacrifices auxquels elles ont consenti, ces dernières années, dans la lutte contre le terrorisme et le crime organisé, sont énormes. Je sais que les veuves et veufs non mariés, les orphelins de guerre, les orphelins des militaires décédés en service commandé, les orphelins à vie qui au moment du décès du militaire se trouvent dans l’incapacité permanente de travailler du fait d’une infirmité déclarée, les ascendants directs des militaires décédés en service commandé, bref tous les ayant-droits méritent tout le soutien de l’Etat. C’est pourquoi, en plus des avantages déjà acquis, j’ai demandé au Gouvernement d’envisager le recrutement par admission sur titre, dans les écoles de formation des officiers, des orphelins remplissant les conditions d’aptitude intellectuelle, physique et médicale et également de réserver un quota en leur faveur lors du recrutement du contingent. De même, j’ai demandé au Gouvernement d’envisager de doubler la pension des ayant-droits des membres des forces de défense et de sécurité décédés en service commandé.

Mes Chers Concitoyens,

Parallèlement aux actions militaires, le G5 Sahel, dont la présidence en exercice est actuellement assurée par le Niger, entend poursuivre la mise en œuvre des priorités contenues dans son plan d’investissement à savoir la défense et la sécurité, la gouvernance, les infrastructures, la résilience et le développement humain. L’accent sera davantage mis sur la Stratégie Intégrée pour la Jeunesse et la Plate-forme Femme du G5 Sahel pour mieux garantir l’autonomisation de ces deux composantes, principales victimes des organisations terroristes, et de rendre effectif le triptyque sécurité, paix et développement.

Ce plan fera l’objet d’une réunion des partenaires techniques et financiers le 6 Décembre prochain à Nouakchott, en Mauritanie. D’ici là, il est prévu, en rapport avec l’alliance pour le Sahel, la mise en œuvre d’actions urgentes dans les zones frontalières fragiles.

Mes Chers Concitoyens,

Au moment où des efforts importants sont consentis pour assurer la sécurité à nos frontières et sur l’ensemble du territoire national, il est déplorable de constater la résurgence des conflits intercommunautaires qui endeuillent des familles entières notamment dans des localités frontalières du Mali. Le Gouvernement est naturellement instruit pour prendre les mesures qui s’imposent afin de faire face à de tels conflits qui impactent la cohésion sociale.

Conformément à ses missions régaliennes, l’Etat veillera à la sécurité de tous, ainsi que j’en ai fait le serment. Il veillera à rendre effectif le monopole de la violence sur l’ensemble du territoire. Il veillera à ce que la coexistence pacifique entre les populations continue à y être une réalité.

J’en appelle donc à tous pour éviter toute forme de justice privée car dans un Etat de droit nul n’a le droit de se faire justice soi-même.

J’en appelle également à vous tous pour une vigilance de tous les instants et pour une collaboration plus soutenue avec nos Forces de Défense et de Sécurité contre les défis actuels auxquels nous faisons face dans l’unité et l’action.

Mes Chers Concitoyens,

Pour garantir votre sécurité et de manière générale pour garantir de manière durable toutes les générations des droits et libertés, il est nécessaire de poursuivre la consolidation des institutions démocratiques. Je ne le répéterai jamais assez : notre pays a besoin d’institutions démocratiques fortes et stables, des institutions capables de concilier ordre et libertés. Pour ce faire la légitimité dont la source est le peuple, constitue une des conditions.

C’est en effet par son vote que le peuple désigne ceux qui doivent le représenter et notamment parler en son nom. C’est pourquoi j’ai demandé au Gouvernement de prendre toutes les dispositions pour mobiliser tous les moyens dont la commission électorale nationale indépendante (CENI) a besoin pour que les prochaines élections soient libres, transparentes, inclusives et conformes aux lois de la République. J’exhorte par conséquent tous les partis politiques et tous les citoyens à se mobiliser pour participer au processus, en cours, de confection du fichier électoral biométrique. Je leur demande de se mobiliser et de soumettre le moment venu, leurs programmes à la sanction du peuple souverain.

Mes Chers Concitoyens,

Cette année, l’hivernage se présente sous de bons auspices. Comme de tradition, les dispositions ont été prises pour appuyer les producteurs. C’est ainsi que le Gouvernement a conçu et mis en œuvre, depuis le mois de février 2018, un plan de soutien d’un montant de 200 milliards FCFA. Il s’agit pour le Gouvernement de procéder, en faveur des populations, à des ventes à prix modéré des céréales, à des distributions gratuites, à des transferts de cash, à la mise à disposition d’intrants, etc.

La mise en œuvre de l’ensemble des axes de l’initiative 3 N permettra de réduire l’importance de cette forme d’intervention d’urgence au profit des mesures structurelles. C’est pourquoi, le Gouvernement est à pied d’œuvre pour la mobilisation des ouvrages de collectes des eaux, la réalisation des maisons du paysan ainsi que la défense et la restauration des terres. J’encourage le Gouvernement dans sa volonté de mobiliser les ressources financières en vue de l’atteinte de ces objectifs qui nous permettront de réduire la pauvreté et d’atteindre l’objectif « faim zéro » d’ici 2021.

Par ailleurs, très fortement engagé dans la lutte contre le changement climatique dont il connait et subit les méfaits, le Niger est résolu à n’épargner aucun effort pour honorer les engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris et des réunions subséquentes et se fait un point d’honneur à mener à bien les activités inscrites dans la feuille de route.

Dans ce cadre, notre pays vient d’accueillir au mois de juillet 2018, une Conférence Internationale sur la Désertification et l’Économie Verte, ainsi que la réunion des Ministres de l’Environnement de la commission climat du Sahel. Ces réunions ont permis de donner à nos experts des orientations claires pour l’élaboration du plan d’investissement climat de la zone Sahel qui sera soumis à la conférence des chefs d’État et de Gouvernement et présenté à la Table Ronde des partenaires techniques et Financiers prévues les 4 et 5 Novembre 2018 à Niamey.

Le dérèglement climatique nous impose de nouveaux comportements. Le défi pour nous se pose en termes de rationalisation de nos ressources naturelles au profit des générations futures. Le défi, c’est aussi la préservation des écosystèmes, de leur productivité, pour mettre fin à l’amenuisement des terres exploitables.

Mes Chers Concitoyens,

J’en viens à présent au défi démographique. Les efforts du Gouvernement dans ce domaine ont permis d’inverser la tendance. La moyenne nationale de l’indice synthétique de fécondité est passée de 7,6 enfants par femme en 2012 à 6 enfants en 2017.

D’autres efforts sont encore nécessaires pour mieux assurer notre transition démographique, pour promouvoir la natalité responsable. En d’autres termes, il s’agit de mieux assumer notre rôle de parents et d’éducateurs au niveau de la cellule familiale qui implique notre capacité individuelle à nourrir, soigner et éduquer nos enfants, tout en leur assurant un meilleur avenir.

J’encourage, à nouveau, le Gouvernement, les chefs traditionnels, les leaders religieux et les acteurs des ONG et associations de développement, dans une synergie de progrès, à poursuivre sans répit les efforts particulièrement appréciables qu’ils déploient déjà pour une natalité responsable, à travers notamment la promotion de la santé de la reproduction, la scolarisation et le maintien de la jeune fille à l’école.

Le Plan de Développement Économique et Social (2017-2021) fait en effet de l’éducation de la jeune fille et de son accès à la formation professionnelle et technique une de ses priorités. Outre son maintien à l’école jusqu’à l’âge de 16 ans, le Gouvernement a pris récemment un décret relatif à sa protection tout au long de son cycle scolaire. Il s’agit de lui créer un environnement favorable par l’octroi de bourses d’études, le soutien alimentaire, et la création d’internats. Plus les filles restent longtemps dans le cycle scolaire, plus elles sont préparées à assurer leur avenir et plus elles échappent aux mariages et aux grossesses précoces, qui les abiment et les détruisent ; ces mariages et grossesses précoces sources de fistules obstétricales déshumanisantes et donc de stigmatisation parfois à vie. Je demande à vous tous et à vous toutes, de vous ressaisir afin de mettre fin à un tel drame.

 Mes chers Concitoyens,

L’école que nous voulons pour nos jeunes filles, nous la voulons pour tous nos enfants.

 Les réformes entreprises par le gouvernement ont permis une amélioration de la qualité de notre système éducatif en 2018 notamment au niveau primaire mais cela est loin d’être suffisant.

  La qualité du système éducatif transparait à travers les résultats de l’évaluation des apprenants en fin de cycle. Les résultats des examens du BEPC et du BAC qui viennent de se dérouler confirment la faiblesse de notre système éducatif. En effet les taux de réussite au BEPC et au BAC sont respectivement de 39,61% et 25,75%. Ces taux très faibles de réussite aux examens ne sont pas le seul fait des enseignants dont le niveau est souvent mis en cause. Ils sont surtout le résultat des perturbations multiples qui jalonnent l’année scolaire. Je veux parler des coups de sifflets intempestifs, des grèves multiples, des retards et absences de tout genre qui ont pour conséquences des programmes inachevés ou bâclés. Ce n’est pas étonnant que les meilleurs résultats scolaires proviennent des établissements où la discipline est de rigueur et où les années scolaires sont complètes et normales. Nos scolaires, élèves et étudiants, doivent comprendre qu’il s’agit avant tout pour eux de préparer leur avenir. Il est dommage que certains d’entre eux entrainent les autres à gaspiller l’occasion qui leur est offerte de s’instruire et de se former afin d’être utiles à eux-mêmes et à la société. Notre pays a une structure démographique avec un actif qu’on ne trouve nulle part ailleurs. Nous sommes déterminés, comme j’ai eu déjà à le dire en d’autres occasions, à transformer cet actif démographique en dividende économique c’est-à-dire non seulement à éduquer et former notre jeunesse mais aussi à lui offrir des emplois.

Nous devons donc agir sur toutes les causes de la baisse du niveau scolaire. J’en appelle à une prise de conscience collective des élèves, des enseignants, des encadreurs pédagogiques, des syndicats, des parents d’élèves et des responsables des établissements scolaires pour un retour à la discipline, à la rigueur qui par le passé ont fait la fierté de notre système éducatif, en vue de rétablir les années scolaires normales. Autrement c’est notre jeunesse qui en paie le prix, un prix lourd de conséquence car il façonne l’avenir de nos garçons et de nos filles et nous éloigne de ce dividende économique que la nation attend d’une jeunesse responsable, bien éduquée et bien formée.

 Mes Chers Concitoyens,

Notre pays est très fortement engagé dans l’œuvre de construction de l’intégration régionale et continentale. Il y va de votre intérêt. Il y va aussi de l’intérêt de tous les peuples de notre continent. C’est pourquoi j’ai accepté à la demande des autres chefs d’État et de Gouvernement, la charge de pilotage de deux programmes majeurs d’intégration régionale et continentale. Il s’agit du projet de la monnaie unique de la CEDEAO dont je partage avec le président du Ghana la coprésidence du comité présidentiel de haut niveau ou Task-force pour permettre à ce programme de faire des avancées significatives.

Il s’agit également du projet de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) dont les textes institutionnels ont été signés en Mars 2018 à Kigali. Le processus de ratification de ces textes suit son cours et le lancement officiel aura lieu à Niamey en juillet 2019 à l’occasion du sommet de l’union Africaine.

Je vous exhorte donc à vous mobiliser pour la réussite de ces programmes et du sommet de l’union africaine qui aura lieu plaise à Niamey en Juin juillet 2019.

Avec la réussite de ces deux programmes, alliés aux autres programmes d’intégration en cours, nous passerons à coup sûr d’une intégration des États à une intégration des peuples pour le plus grand bonheur de toutes et de tous.

Bonne fête de l’indépendance à toutes et à tous ;

Que Dieu vous bénisse

Que Dieu bénisse le Niger

 Je vous remercie

 Niamey, le 02 août 2018