CEDEAO : Selon le Président Issoufou, « la CEDEAO ne peut tolérer, pour quelque raison que ce soit, la déstabilisation d’un État membre »
DISCOURS DE SEM ISSOUFOU MAHAMADOU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE DU NIGER, PRESIDENT DE LA CONFERENCE DES CHEFS D’ETAT ET DE GOUVERNEMENT DE LA CEDEAO AU SOMMET EXTRAORDINAIRE SUR LA GUINEE-BISSAU
Excellences Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement,
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale
Mesdames et Messieurs les Présidents des Institutions,
Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement,
Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO,
Monsieur le Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel,
Monsieur le Représentant du Président de la Commission de l’Union Africaine,
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue à Niamey et de vous remercier pour avoir accepté de prendre part à ce Sommet Extraordinaire sur la Guinée-Bissau malgré un délai de convocation très court. Votre présence est le signe manifeste de votre engagement à assurer la paix et la stabilité de notre sous-région et de votre attachement aux valeurs communes et normes adoptées par notre organisation notamment celles définies à travers les dispositions pertinentes du Traité Révisé et du Protocole relatif aux mécanismes de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix, et de la sécurité du 10 Décembre 1999 ainsi que du Protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance du 21 Décembre 2001. Sans le respect de ces valeurs et normes communes, il est illusoire de penser que nous pourrons atteindre nos objectifs d’intégration.
Excellences, Mesdames, Messieurs,
Notre sommet extraordinaire se tient dans un contexte sécuritaire difficile avec des victimes civiles et militaires dans certains pays de notre espace. Je vous prie de bien vouloir observer une minute de silence en leur mémoire.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Si nous avons pris la décision de convoquer ce Sommet extraordinaire, c’est parce que la Guinée-Bissau, un État membre de notre Communauté, vit actuellement une situation de crise politique et institutionnelle grave, avec des conséquences désastreuses pour ce pays et pour notre sous-région. Cette situation constitue un écart grave par rapport aux valeurs et normes définies dans les protocoles que je viens de citer.
La crise politique que la Guinée Bissau traverse n’est pas nouvelle. Je voudrais rappeler que la CEDEAO s’est déjà beaucoup investie depuis 2015 pour y soutenir la normalisation socio-politique et garantir la paix et la sécurité.
Dans le cadre de ces efforts, notre conférence a procédé à de nombreuses médiations et pris plusieurs décisions conformément à la Feuille de Route de l’Accord de Conakry d’octobre 2016. La mise en œuvre de ces différentes décisions et le soutien technique et financier de la CEDEAO et des autres partenaires régionaux et internationaux ont permis d’aboutir aux élections législatives du 10 mars 2019.
La tenue de ces élections législatives revêtait une importance cruciale pour remettre le pays sur la voie de la stabilité, dès lors que ces élections avaient été jugées transparentes, crédibles et acceptées par tous les acteurs.
Sur la base du résultat de ces élections législatives et d’un consensus obtenu au niveau de toutes les parties en conflit et en conformité avec les décisions prises par notre conférence, au sommet tenu le 29 juin 2019 à Abuja, un Premier Ministre a été nommé, un gouvernement mis en place et la date des élections présidentielles fixée au 24 novembre 2019. Dans le cadre de ce consensus le président de la république dont le mandat était arrivé à terme depuis le 23 juin 2019, a été maintenu en poste jusqu’à la fin du processus électoral.
Or à notre grande surprise, par un décret en date du 28 octobre 2019, le Président, limoge le Premier Ministre et son gouvernement et nomme un nouveau Premier Ministre, et un nouveau gouvernement, et ce à trois semaines du premier tour de l’élection présidentielle. Une telle décision est de nature à remettre en cause le calendrier électoral cité plus haut, à créer un blocage politique des Institutions, et surtout, à accroître les risques de confrontation entre les différentes forces de défense et de sécurité nationales, sans oublier la Force d’appui à la paix de la CEDEAO (ECOMIB).
Nous sommes donc devant une situation de déstabilisation du pays avec des risques réels de guerre civile dans la mesure où le gouvernement mis en place par la majorité parlementaire et dont le programme a été adopté par l’assemblée nationale le 15 Octobre 2019, est demi par un Président de la République dont le mandat est arrivé à terme mais maintenu en poste suite au consensus de la classe politique validé par notre organisation.
Le Comité Ministériel de suivi de la CEDEAO, dépêché sur place, a réagi avec fermeté en dénonçant ce dérapage et a demandé, au nom de notre organisation, de poursuivre le processus électoral suivant le calendrier consensuellement arrêté.
Je voudrais à ce propos, saluer les organisations internationales et les pays qui ont soutenu la position de la CEDEAO.
Le Comité Ministériel de suivi nous fera rapport de son évaluation de la situation, ce qui va nous permettre d’en débattre, d’apprécier les différentes recommandations et de prendre les décisions idoines en vue d’une sortie rapide de cette crise. En tout état de cause notre sommet doit envoyer aux protagonistes un message clair : la CEDEAO ne peut tolérer, pour quelque raison que ce soit, la déstabilisation d’un État membre.
En souhaitant pleins succès à nos travaux, je déclare ouvert le Sommet Extraordinaire sur la Guinée-Bissau.
Je vous remercie.