JUSTICE ET DROITS CIVIQUES : L’occupation de l’espace civique et l’instrumentalisation de la Justice
(NIAMEY- Mercredi 30 Septembre 2020) Après six (6) mois de détention, M. Moudi Moussa, M. Maikoul Zodi et M. Halidou Mounkaila, trois (3) acteurs de la société civile nigérienne ont été libérés le 29 Septembre. Cet après-midi, ils ont été accueillis par leurs camarades en grande pompe au siège de l’Association Alternative Espace Citoyen (AEC) où ils ont animé un point de presse. Lequel point de presse a levé le voile sur les redoutables défis liés à l’occupation de l’espace civique au Niger.
L’occupation de l’espace civique n’est pas un défi à l’autorité de l’Etat.
Outre l’adoption de la Loi n°2020-19 du 03 juin 2020 portant interception de certaines communications émises par la voie électronique au Niger, pour l’essentiel, la société civile, qualifiée de ‘’putschiste’’ par le pouvoir de Niamey à cause de ses prises de positions critiques, a pointé du doigt la Justice. Selon toute vraisemblance, l’occupation de l’espace civique est devenue synonyme de défi à l’autorité de l’Etat. Du reste, les interdictions systématiques des manifestations publiques, les arrestations et les détentions arbitraires des acteurs de la société civile, des opposants politiques, l’interpellation des journalistes, des leaders d’opinion, des lanceurs d’alerte sont entre autres faits dommageables qui mettent en branle la jouissance effective des libertés individuelles et collectives. La situation mérite une attention soutenue quand on sait que le pays est au milieu d’un processus électoral sur fond de tension politique prévisible d’une part, et de l’autre, il fait face à une crise sécuritaire complexe.
La perception de certaines OSC de la Justice
« Au Niger, ceux qui détournent les deniers publics se pavanant sans être inquiétés tant dis que ceux qui les dénoncent sont vite traqués puis jetés en prison sans aucune forme de procès » a dit Maikoul Zodi. Cette perception inquiétante du fonctionnement de l’appareil judiciaire est courante dans les différents états-majors de la société civile nigérienne. A la vérité, il s’agit d’une allusion faite à plusieurs scandales financiers dont principalement celui qui a éclaté au Ministère de la Défense Nationale (Plus de 70 Milliards détournés) et qui a impliqué des personnalités politiques ainsi que des hommes d’affaires proches du pouvoir de Niamey sans qu’ils ne soient inquiétés ou traduits devant la Justice. « Cette justice à double vitesse n’est pas de nature à préserver la Paix et la Quiétude sociales dans notre pays » a asséné sur un ton révoltant Hadiza Moumouni, étudiante syndicaliste à l’Université de Niamey. Dans le même ordre de pensée, M. Moussa Tchangari, Secrétaire Général de l’AEC s’est insurgé contre ce qu’il a qualifié de « l’instrumentalisation de la Justice ». « Certes nos camarades ont été libérés, mais nous allons continuer à nous battre pour l’instauration d’une véritable Justice, pour que la justice soit rendue à tous les citoyens dans notre pays » a-t-il ajouté.
Une nouvelle manifestation prévue le 4 Octobre prochain
« Je suis au regret de constater qu’un de nos anciens camarades en la personne Morou Amadou (NDLR : Un acteur de la société civile et virulent défenseur des droits de l’homme sous le régime de Mamadou Tandja) qui soit à la tête du département de la Justice et que certaines dérives se produisent dans son fonctionnement » a affirmé M. Maikoul Zodi. « Nous assurons l’opinion publique que notre emprisonnement ne nous fera pas fléchir dans notre engagement pour l’instauration de la Justice et de la Bonne Gouvernance dans notre pays » a-t-il poursuivi tout en invitant les populations de la ville capitale à participer à une nouvelle manifestation publique prévue le 4 Octobre prochain.
Le but, apprend-on, est de dénoncer instrumentalisation de la Justice et l’impunité, de plaider pour que Justice soit rendue aux familles de trois (3) personnes tuées lors de la manifestation du 15 mars 2020, que toute la lumière soit faite sur le scandale financier au Ministère de la Défenses National (MDN).
Ibrahima Adamou / niameysoir.com