Fusion des partis politiques ou insulte à la Démocratie ?


Le droit commercial enseigne que la fusion est une opération juridique consistant à regrouper plusieurs sociétés qui disparaissent en une seule par voie de transmission universelle de patrimoine. La nouvelle société prend-t-elle une nouvelle dénomination ou bien c’est le nom de la société ayant le plus d’actions qui sera retenu ?

Ici, la question est plutôt de savoir ce qu’il en est en sciences politiques ou en politique tout simplement. Partant du postulat ci-dessus, il est possible de tenter un rapprochement  le moins imprudent sous l’angle de la politique où la différence entre « fondre » et « fusionner » semble très légère. Le mot « fusion » qu’on ne retrouve que dans le ‘’lexique nigérien des termes politiques’’ est sans doute une prise de précaution face au concassage généralisé des partis politiques sous le joug de la Renaissance. Plus qu’une alliance politique ordinaire, la fusion apparait de ce point de vue comme un impératif de sécurité généralement pour les partis politiques  peu connus  et ceux en voie de disparition au rang desquels tout naturellement Salama, Murna Fara’a, Ni Ima, et Haut Niveau. Pour ne citer que ces vaincus de la vie politique. Pour les partis d’accueil, la fusion est un argument défendable quant à leur poids et représentativité.

DSCN1647-OK-PHDAu Niger, hormis les formalités propagandistes (signature du pacte de la fusion), les partis qui fusionnent ne disent jamais clairement à leurs bases respectives la portée juridique de leur ‘’ contrat’’. Mais encore faut –il que ce deal politique intéresse d’une part, les militants du parti qui se fond car obnubilés par l’espoir d’une vie politique meilleure et ceux du parti d’accueil excités de voir leur structure s’agrandir. Pour l’un comme pour l’autre, ce qui compte c’est l’euphorie et l’espoir que suscite la fusion de leurs formations politiques dans un environnement politique hostile où même les alliances contre nature ont fini par montrer leurs limites. Première lecture

Deuxième lecture : l’hypocrisie dans la fusion des partis politiques

MPNGIl y a fusion lorsqu’un carreau de sucre ou un glaçon se fond dans l’eau. Résultat : on obtient soit de l’eau sucrée soit de l’eau glacée (fraîche). De toute évidence dans cet exemple ni l’eau, ni la glace encore moins le sucre ne serait plus le même. Or, tel n’est pas le cas s’agissant des partis politiques nigériens qui parlent de « fusion ». En effet, chacun garde sa dénomination, son patrimoine, ses symboles, couleurs ; et dans tous les cas chaque parti reste vigilant dans son coin avec son état-major constitué des membres influents, fondateurs et financiers. On fusionne mais chacun garde ses arrières et préserve la galaxie de son parti. Autrement expliqué, ce jeu politique frise l’hypocrisie et l’irrespect à l’intelligence des militants de base.

Pour preuve, les partis en voie de disparition (Murna Fara A, Haut Niveau, Salama et Ni Ima) (qui ‘’ont fusionné’’) ou qui ‘’se sont fondus’’ dans les partis plus ou moins émergents (MPR Jamhurya et MPN Kiishin Kassa) ont-ils convoqué leurs instances suprêmes respectives (Congrès statutaire) pour se pencher sur l’idée et ou la décision de fusion ? Réponse : Il est certain que dans leur majorité, leurs militants de base n’ont fait que constater cette fusion non pas sans surprise.

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De l’autre coté, les instances statutaires des partis MPR Jamhurya et du MPN Kiishin Kassa ont-elles clairement défini les contours et les détours de « la fusion » avant de l’approuver et donner quitus à leurs directoires respectifs ?

 Troisième lecture : la fusion des partis politiques ou insulte à la Démocratie

Un parti politique respectueux des Valeurs Universelles de la Démocratie peut-il accepter d’accueillir ou de fusionner avec un autre qui ne les respecte pas en son sein ? En Démocratie, l’initiative de fusion ou des alliances entre partis politiques est un processus inclusif qui doit requérir l’avis des instances de tous les partis concernés. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas au Niger où tout se passe généralement entre les présidents des partis autour d’une tasse de thé.  Pourtant, les alliances politiques en général et la fusion en particulier, sont des grandes décisions dans la vie d’une formation politique et par conséquent elles doivent être démocratiquement approuvées par leurs instances réglementaires.

DSCN2092-MPNQuestion : le bureau politique national d’un parti politique ou son président peut-il à lui seul décider de la fusion du parti sans au préalable consulter l’instance suprême qui rassemble ses militants de base ? Si oui, alors cette absurdité juridique devrait au moins faire l’objet d’un procès-verbal signé par les présidents de l’ensemble des coordinations régionales du parti en question. Cela par respect aux règles de transparence dans la gestion démocratique du parti mais aussi par respect aux militants de base qui doivent à l’avenir voter en faveur du candidat du parti d’accueil. C’est dire qu’un parti politique n’est pas la propriété privée d’un seul individu ou d’un groupe d’individus interconnectés par des intérêts égoïstes.

La fusion ou  la survie des partis satellites en voie de disparition :

DSCN1648-PHDLa fusion profite en premier lieu à ‘’la personne du président’’ dont le parti se fond (Mamoudou Djibo, Akoli Daouel, Abouba Ganda, Adamou Garba) ainsi qu’à leurs acolytes de première heure. Tant pis pour les militants de base plus précisément les petits récalcitrants et autres rêveurs debout incapables d’admettre le caractère microscopique et sans enjeu de leur parti dont l’âme venait d’être vendue assurément et unilatéralement par le ‘’camarade président’’. Dans cette affaire, la survie est le seul intérêt désespéré que gagne le parti qui proclame sa fusion aux yeux du monde et sous les acclamations des militants du parti d’accueil.

Lequel parti d’accueil est de toute évidence meilleur gagnant de ’’l’opération’’. D’abord parce qu’il reste tel c’est-à-dire sans changement de dénomination, ensuite il gagne en militants aussi microscopique que puisse être ‘’le parti parasite’’. A la vérité, ce deal politique n’est qu’un jeu d’esprit et des consciences des militants qui voient la confiance en leurs leaders respectifs trahie pour un autre leader politique sans leur consentement ou avis préalable. Ce business politique profite plus aux individus (les présidents et personnes influentes des partis signataires) qu’aux formations politiques porteuses de Projets de Société pour le pays. Sur ce, il est à craindre pour un parti satellite en voie de disparition que la  fusion soit synonyme de dissolution d’où cette question à méditer : Quel mot utilisera notre classe politique quand un parti décide un jour de resurgir d’une fusion ?

Écrivain du Sahel

niameysoir.com