SECURITE : Barkhane, 22 frappes et 5.000 mouvements d’avion en 12 mois, 16 milliards d’investissement par an au Niger
La situation sécuritaire nationale et sous régionale devenant de plus en plus préoccupante, les bases militaires occidentales installées au Niger font l’objet de vives critiques portant, entre autres, sur l’état de leur collaboration avec les Forces Armées nigériennes (FAN). En ce qui concerne l’armée française, des rumeurs et des fausses informations sont assez souvent entretenues sur les réseaux sociaux, des médias locaux ou dans les salons de Niamey faisant planer le doute sur l’efficacité et le but de la mission Barkhane dans les pays du G5 Sahel en général et au Niger en particulier. Les plus courantes de ces rumeurs font état du pillage des ressources naturelles (or, uranium) par les forces occidentales, d’une déstabilisation du Niger par la France, et ou d’une complicité de celle-ci avec les terroristes (renseignements et fournitures d’armements). D’autres spéculations de la rue, les plus récentes, parlent d’un transfert de la base aérienne projetée (BAP) de Niamey à Tillaberi. Mais à comprendre le diplomate français basé à Niamey, il n’en est rien.
Fort de la persistance de toutes ces allégations et contre-vérités qui alimentent et agitent le débat public, l’armée française a décidé, vendredi 13 juillet 2019, d’ouvrir les portes de la BAP à une vingtaine de journalistes des médias public et privé du Niger (Media en ligne, presse écrite, parlée et audiovisuelle). Installée au Niger en 2013 dans le cadre de l’Opération Barkhane pour lutter contre le terrorisme au Sahel, la BAP est située dans l’enceinte de la base aérienne 101 des FAN (localement appelée escadrille).
Objectif de cette visite guidée : rappeler le but et les missions de la BAP, présenter ses appareils à la presse, expliquer la coordination des opérations ainsi que la collaboration avec les FAN. Occasion pour les journalistes d’échanger directement et ce, pour la première fois, avec le Commandement de la BAP. Pendant près de cinq (5) heures d’horloge qu’a duré cette visite de presse, les journalistes ont échangé sur plusieurs points avec les différents responsables des services du Commandement de la BAP (Logistique, Hydrocarbures, Infirmerie, Pharmacie, Pompiers, Informatique, Génie, Sport etc.).
Dans l’exposé qu’il a animé à l’entame de cette visite, le Colonel Patrice MORAND, commandant de la BAP, a souligné que « le but de la mission Barkhane est d’affaiblir les terroristes dans la région du Sahel ». Dans le même temps, Barkhane participe au développement à travers des appuis multiples couvrant le domaine militaire, de la diplomatie et de développement. Il a fait cas des appuis en infrastructures (extension de la base aérienne 101 de Niamey et projet de construction d’une deuxième piste), soutien logistique (au P.C du G5-Sahel), renforcement des capacités logistiques et opérationnelles des FAN, constructions des postes de combat, appui aérien d’urgence, soutien aux zones inondables (ville de Niamey), renforcement des pistes latéritiques, dons de fournitures scolaires etc.
Outre les 350 emplois (locaux) directs crées, au Commandant français d’expliquer que Barkhane au Niger, c’est aussi un investissement en infrastructure de développement estimé à 16 milliards par an, sans compter sa première place en matière de consommation des hydrocarbures estimée à 22 milliards par an. « 80% de carburant utilisé est nigérien, nous l’achetons à la SONIDEP via TOTAL » précise Patrice MORAND.
22 frappes et 5.000 mouvements d’avion en 12 mois
Répondant aux questions des journalistes à propos de certaines rumeurs, le Colonel Patrice MORAND, n’a pas mâché ses mots : « On n’est pas là pour couler des lingots d’or. Ça, c’est complètement fantasmagorique…..nous sommes là à la demande de l’Etat nigérien souverain et on partira dès que celui-ci le demandera ».
Parlant des interventions militaires, il poursuit : « la BAP est un outil de combat ». A ce titre, elle dispose de 3 drones, 4 Mirage, 2 ravitailleurs et 2 avions de transport. A ce jour elle compte 450 soldats (dont 10% de femmes) sur les 4.500 de l’Opération Barkhane en Afrique (parmi lesquels 3500 sont basés dans la partie fuseau Ouest). Ces hommes sont déployés entre le Tchad, le Niger, le Mali, le Burkina Faso, la Bangui et le Sénégal
Les rotations des soldats français se font tous les quatre (4) mois soit 40 000 soldats français en transit. Sur les 12 derniers mois, Barkhane a procédé à 22 frappes pour 5.000 mouvements d’avion. Les décisions de tir sont prises soit par le commandement aérien basé à Lyon en France soit par le commandement de Barkhane basé à N’Djamena au Tchad. L’un dans l’autre, le Commandant de la BAP n’a pas manqué d’insister sur l’immensité de la zone d’intervention ainsi que la délicatesse des interventions militaires qui tiennent absolument compte des exigences au respect du droit international humanitaire en temps de guerre : « On ne veut pas faire de bavures. S’il y a des civils, des femmes, des enfants… on ne tire pas. On ne prend pas de risques », a-t-il dit.
Qu’en est-il de la collaboration entre Barkhane et les FAN ?
Réagissant aux préoccupations des journalistes nigériens sur la collaboration entre Barkhane et les FAN, Patrice MORAND a assuré que celle-ci se fait dans un cadre cordonné entre les deux hiérarchies militaires (françaises et nigériennes). En pratique, dans le domaine militaire, la collaboration entre les deux (2) armées portent essentiellement sur les échanges de renseignements, la surveillance et caractérisation puis les frappes aériennes en vue de la neutralisation des réseaux aériens. En outre, il a mentionné l’appui à la manœuvre terrestre (escorte des colonnes et convois, appui aérien graduel, évacuation médicale etc.).
Enfin, notons que cette visite de presse s’est déroulée en présence de SEM. Alexandre Garcia, Ambassadeur de France au Niger entouré de l’Attaché Militaire, de la Conseillère politique ainsi que des responsables du service de communication de l’Ambassade.
Abdoulaye Abdourahamane Ahamadou
Réseau des Journalistes pour la Sécurité
et la Prévention des Conflits au Sahel
Analyste Conflits WANEP-Niger